EN 81, LA GAUCHE ARRIVE AU POUVOIR AVEC CE SLOGAN :
"CHANGER LA VIE"
"CHANGER LA VIE"
LE PRENANT AU MOT, Gabriel Cohn-Bendit , enseignant à St Nazaire envoie une lettre au ministre de l'éducation de l'époque, Savary, sur le thème "laissez-nous inventer, avec des jeunes, une institution".
Ainsi naissait le Lycée expérimental de Saint-Nazaire.
Aujourd'hui, dans le contexte d'une nouvelle politique, que vont devenir ces expériences ?
Ci-joint :
1 - extrait de la présentation du Lycée expérimental de St Nazaire.
2 - Le courrier adressé au nouveau ministre par les membres du Conseil National de l’Innovation pour la Réussite Scolaire
1- EXTRAIT: PRÉSENTATION DU LYCEE EXPERIMENTAL DE ST NAZAIRE
17 boulevard René Coty - B.P. 272
44606 SAINT NAZAIRE
02 40 66 78 52 - fax : 02 40 22 16 11
Coordination : collégiale, par l'équipe éducative
Etablissement public. Création : 1er février 1982.
Second cycle (de 2de à Terminales)
Effectif actuel : 200 élèves.
Cantine cogérée par les élèves et l'équipe
HISTORIQUE:
La chronologie des tout premiers temps du lycée expérimental de Saint-Nazaire fait bien apparaître les différentes étapes et dimensions de l’élaboration de la démarche autogestionnaire :
• 25 mai 1981 : rédaction de la lettre ouverte au camarade ministre de l’Éducation, signée "Jean-Gabriel Cohn-Bendit, enseignant à Saint-Nazaire";
• 26 juin : publication de la lettre dans Libération ;
• 27 juillet : A. Savary reçoit G. Cohn-Bendit et A. Daniel, qui proposent "une structure autonome, libérée des carcans administratifs" (Le Monde, 30 juillet) où se retrouveraient des professeurs et des élèves "insupportables à l’Éducation nationale" (Le Matin, 30 juillet) ;
• 6 octobre : entrevue au cabinet du ministre pour préciser le projet présenté en septembre ;
• 6 novembre : présentation du dossier élaboré par "l’ensemble de l’équipe éducative (19 personnes) et une trentaine de futurs élèves. "Qu’il soit élaboré en commun nous a paru fondamental", dit le texte de présentation.
Ainsi, dès le début, et avant même que l’expérience ne commence à fonctionner réellement (début 1982), l’autogestion était le principe de base : autogestion au sens de l’autonomie totale par rapport aux institutions externes, autogestion interne par l’élaboration en commun entre enseignants et élèves du projet global, mais aussi reconnaissance de la spécificité du point de vue collectif des deux groupes (distinction entre réunions de l’équipe éducative, réunions du groupe enseigné, réunions communes) concernant l’évaluation de l’institution.
2- COURRIER DE L'ICEM-Pédagogie Freinet
Messieurs les Ministres de l’Education Nationale,
Sous l’impulsion issue de nos mouvements, votre prédécesseur avait créé le Conseil National de l’Innovation pour la Réussite Scolaire. Ce chantier devait promouvoir l’innovation au sein du système éducatif en facilitant, entre autres, l’ouverture d’établissements et de structures différentes. Au final ce chantier n’a accouché que de quelques réalisations marginales, rendues précaires par leur caractère expérimental. Il s’est détourné de plus en plus vers la prise en charge d’élèves en très grande difficulté, renvoyant l'innovation à la périphérie du système scolaire.
Nous tenons à faire entendre une autre voix, celle qui redonne à l’acte d’éduquer sa place primordiale et à nos enfants l'image honorable qu'ils méritent. Une autre école est possible : laïque, populaire, coopérative, émancipatrice, cette école existe depuis des décennies. Des pédagogies telles les pédagogies coopératives (dont la pédagogie Freinet) la mettent en oeuvre au quotidien. Mais elles ont toujours été réduites à la confidentialité.
Elles savent pourtant allier avec succès éducation et appropriation des connaissances :
- En reconnaissant les enfants comme auteurs de leur devenir et capables de choisir, nous leur ouvrons les portes de l’autonomie et la responsabilité.
- En développant une éducation globale polytechnique, valorisant tous les langages et s’appuyant sur la culture première des enfants, nous pouvons les accompagner, pas à pas, dans leurs tâtonnements, de leur propre culture vers d’autres cultures, vers la Culture. Des textes libres aux oeuvres littéraires, des expressions corporelles, théâtrales, musicales aux oeuvres des « grands maîtres », des créations mathématiques à la mathématique de vos programmes, nous rendons les enfants disponibles aux cultures que les sociétés nous ont léguées dans l’histoire. Au travers de ces créations, expressions libres ou guidées, nous nous revendiquons « éducateurs passeurs de cultures ».
- En associant les enfants à l’élaboration des règles, en leur donnant les outils pour dépasser de manière constructive les inévitables conflits, en créant une démocratie participative, nous leur donnons toutes les chances de s’approprier ces règles communes.
- En offrant aux enfants, dès l’école, d’authentiques situations de participation aux décisions et aux projets, nous oeuvrons à la construction d’individus capables et soucieux d’agir pour le collectif.
- En travaillant au sein d’équipes pédagogiques coopératives, ouvertes au dialogue avec les partenaires éducatifs (parents, acteurs sociaux et culturels des quartiers, des communes), ces objectifs ont plus de chances de se réaliser.
Dans nos classes vous pourrez constater qu’on travaille et qu’on apprend dans un climat serein, même dans les quartiers dits difficiles. Nous vous invitons à y venir.
Pour autant, nous constatons chaque jour les limites de notre action éducative dans une société ravagée par les effets du libéralisme économique, dans une société gangrenée par l’esprit de compétition et son lot d’exclusions et de violences sociales. Nous ne voulons plus être les pompiers de service, les missionnaires d’une pacification sociale à laquelle on chercherait à nous assigner, et à bon compte. Nos pratiques pédagogiques participent d’un projet politique de type collectif et ouvert à tous.
Cette lettre est un cri d’alarme mais aussi un cri de révolte face aux régressions de notre système éducatif et de notre société. Avec les récentes lois des ministres Sarkozy-Perben auxquelles vos projets actuels emboîtent le pas, c’est le tout-répressif qui est mis en avant, ceci dans un contexte ultra-sécuritaire. Alors comment s’étonner que, du haut de leur chaire, des voix, fort écoutées au demeurant, prônent le retour à l’instruction pure et dure ? Quelles perspectives engageantes pour les enfants, les jeunes, et notamment les plus défavorisés d’entre eux dont le choix n’est plus alors qu’entre soumission ou rébellion A vouloir éteindre ainsi le feu que des hordes de « sauvageons » propageraient soi-disant dans la société, c’est tout bonnement la flamme de l’ambition qu’on éteint, le désir de futur qu’on étouffe, avec le risque certain que les dernières étincelles soient celles de la révolte.
pour une école coopérative et émancipatrice pour tous les enfants.ICEM-Pédagogie Freinet
Icem.pedagogie.freinet@wanadoo.fr
27 novembre 2002
Premiers signataires : REVEIL, Pr Hubert Montagner, ECE, Réseau des Savoirs...
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